ORIENTATIONS 2008-2014
Institut séculier féminin du Cœur de Jésus

Qui me donnera le souffle et l’espérance pour répondre à l’appel du Seigneur ? Cette question, elle nous habite quand nous réfléchissons à notre avenir, à celui de notre Institut. Oui, le Christ nous a appelées à vivre avec lui et de lui, et, inséparablement, à être dans le monde signes de son amour passionné pour nos frères et soeurs. Jamais nous n’aurons fini de réaliser « la largeur, la hauteur, la longueur, la profondeur… » du don qui nous est ainsi fait. Mais nous savons que ce don, il faut le reprendre et l’actualiser sans cesse pour être vraiment – selon les mots de Benoît XVI aux instituts séculiers – « l’un des innombrables dons avec lesquels l’Esprit Saint accompagne le chemin de l’Eglise et la renouvelle au cours des siècles » (3 février 2007)

Aujourd’hui, quand nous essayons de discerner ensemble les appels faits à l’Institut en relisant les modalités de notre présence au monde et la façon dont l’Esprit nous pousse à prendre une part active à la venue du Royaume, en revoyant ce qu’il nous montre comme voies de fécondité, il nous semble identifier six grandes exigences, points de passage « obligé » pour les années qui viennent :

  • Revivifier l’appel reçu,
  • Recevoir le monde avec bienveillance et passion,
  • Chercher à comprendre le monde où nous vivons et l’aimer en vérité,
  • Être dans le monde un creuset de consécration,
  • Nous ancrer dans un corps solidaire,
  • Trouver les mots pour dire ce qui nous fait vivre.

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Ce qui nous fonde, c’est l’appel que le Seigneur fait à chacune de nous : fondamentalement, c’est lui qui nous rend profondément heureuses. Le souffle et l’espérance, c’est d’abord dans l’appel reçu que nous les trouvons, quand nous faisons mémoire de ces jours où nous avons entendu la discrète invitation : « Toi, suis-moi. » Parce que nous faisons l’expérience de la fragilité, nous savons aussi qu’aux jours plus difficiles de nos vies, quand notre confiance est en danger de vaciller, ce souvenir reste le roc qui ne trompe pas. Il n’y a pas de voie plus sûre pour retrouver l’empreinte ineffable de la présence du Seigneur que d’en faire mémoire, redisant alors : « Notre cœur n’était-il pas tout brûlant en nous tandis qu’il nous parlait en chemin? » (Lc 24,32)

ORIENTATIONS I
  • L’Institut nous poussera à retrouver les occasions de faire mémoire de cet appel premier qui ne déçoit pas,
  • Nous nous aiderons mutuellement à trouver l’occasion de le revivifier

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Plongées dans le monde : voilà ce qui caractérise notre façon de vivre : il n’y a pas le monde d’un côté et nous de l’autre ; du monde nous sommes et nous le sommes entièrement. C’est là que nous entendons l’appel à lui rendre une espérance, et si nous désertions le lieu où le Seigneur nous a plantées, qui donc prendrait notre place ? C’est pourquoi si les façons d’être dans ce monde que Dieu aime sont multiples, nous avons à nous y enraciner chaque jour davantage.

Recevoir le monde avec bienveillance et passion, c’est essayer d’avoir le regard même de Dieu, cultiver l’action de grâce et célébrer les merveilles qu’y accomplit le Seigneur. C’est dépasser aussi chaque jour le découragement possible pour témoigner de notre espérance : chaque matin ouvrir les yeux à la lumière, chaque jour avoir le courage de vivre, chaque jour présenter à Dieu la beauté et la bonté des hommes et femmes de la Création. La prière d’alliance que nous voulons quotidienne nous y invite.

ORIENTATIONS II

L’Institut nous engage à vérifier souvent ensemble :

  • l’authenticité sans faux-fuyant de notre présence au monde,
  • les modalités concrètes de cette bienveillance sans condition.

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Chercher à comprendre le monde où je vis, se rendre réceptive à ses richesses, à ses espoirs, à ses tâtonnements ne dispensent pas d’exercer sa lucidité et son discernement. Pas d’admiration béate, ni de pessimisme décourageant : il s’agit de travailler à connaître le monde en profondeur, ses courants de pensée, ses grandes interrogations, les éclairant à la lumière de la foi et de la Tradition de l’Eglise. Cela exige de ne pas nous contenter de l’opinion commune, même au risque d’être à contre-courant des modes et/ou d’être signe de contradiction : Jésus, demandant à son Père de nous garder, nous a redit que nous ne sommes pas du monde comme Lui n’est pas du monde (Jn 17,15-16). Ce qui vérifie l’authenticité de notre suite du Christ, c’est que nous vivons simultanément ces deux aspects.

Aimer passionnément ce monde, comme Jésus lui-même l’a aimé, c’est l’aimer en vérité, avec le souci de l’aider à grandir toujours plus vers ce à quoi il est appelé, attentives au brin d’herbe qui pousse, veillant à ne pas éteindre la mèche qui fume, mais loin des compromis faciles. Aimer passionnément ce monde jusqu’à oser des choix qui nous exposent. Une question se pose alors : comment oser être pleinement nous-même si nous ne pouvons argumenter nos convictions avec ceux au milieu desquels nous vivons ?

ORIENTATIONS III
  • L’institut nous aidera à vérifier souvent comment nous sommes du monde sans être du monde,
  • Nous mettrons l’accent sur une formation adaptée aux conditions de vie de chacune, qui nous rende aptes à comprendre le monde et les forces qui l’habitent, à nous y positionner selon les convictions profondes qui nous font agir, à l’orienter vers les réalités du Royaume

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Être dans le monde un creuset de consécration : levain dans la pâte ou sel de la terre, il nous faut être ce feu qui brûle et rayonne de la foi, de l’espérance et de l’amour que lui donne son Seigneur et qui lui remet tout. Le Seigneur seul consacre, mais nous entendons la demande du Christ Jésus à son Père : « Père, consacre-les par la vérité : ta parole est vérité » (Jn 17,17).

Il s’agit de laisser le Seigneur consacrer le monde à travers moi. Consacrée par Dieu et pour lui, je dois lui rendre cette part du monde qu’il me donne : par mon oui, je le rends mystérieusement présent là où je vis. Plus je me laisse configurer au Christ, plus je le rends présent et agissant dans le monde pour le salut des hommes (Vita consecrata, 72). Notre mission est précisément de renouveler à chaque instant ce OUI qui consacre les réalités qui nous entourent.

ORIENTATIONS IV
  • L’Institut nous provoque à prendre les moyens de développer cette conscience d’être envoyée à toute personne que nous rencontrons,
  • Nous aurons à cœur de porter nos frères et sœurs au Cœur de Dieu par les moyens appropriés à chaque situation.

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Développer en nous la bienveillance, chanter l’action de grâce, présenter à Dieu la beauté de la Création, être provoquée à dépasser l’opinion commune et à tenir ferme dans ce que nous reconnaissons comme bon, le laisser consacrer le monde à travers nous, comment pourrions-nous le vivre isolées ? C’est au corps que constitue l’institut séculier que l’Eglise donne mission dans et pour le monde. Cet appel du Seigneur, nous ne le vivons pas individuellement, mais au sein de l’Institut séculier féminin du Cœur de Jésus, au cœur d’une famille spirituelle – la Famille Cor Unum – qui se reçoit de saint Ignace de Loyola et de la spiritualité du Cœur de Jésus, enracinées dans la Tradition de l’Eglise.

C’est ensemble, en « corps » que nous faisons nôtres les intuitions de nos fondateurs – Pierre de Clorivière, Daniel Fontaine – essayant de les reformuler pour aujourd’hui. Le pourrions-nous si nous n’avions l’amour de l’Institut, l’amour de la Famille ou de l’Eglise ? Ils sont toujours à développer. Mais cet amour se concrétise aussi avec les frères et sœurs que le Seigneur me donne à un titre particulier. Par notre engagement dans l’Institut, « nous nous promettons d’être les unes pour les autres des compagnes de route pour les jours heureux comme dans les passages difficiles » (Const. 87). Souvent éloignées les unes des autres, parfois isolées, demeure l’engagement mutuel à faire corps : aux jours plus difficiles, il est bon de savoir que, plus loin, une sœur vit elle aussi sa vocation dans l’Institut, qu’elle prie et peut-être – sûrement – me porte.

ORIENTATIONS V
  • Ensemble, nous développerons notre amour pour l’Institut et la Famille, pour l’Eglise, pour ce « corps » que le Seigneur nous donne,
  • Nous établirons des liens de communication forts entre nous là où c’est possible et à tous les niveaux, ne craignant pas d’inventer des moyens nouveaux d’échange et de participation, de prise en charge mutuelle, nous interpellant souvent sur la priorité que nous donnons aux occasions de rencontre.

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Veuves ou célibataires, nous savons bien quel est le mouvement premier qui nous a mis en route : la charité même du Christ. Ce don qui nous a été fait, nous ne pouvons pas le garder pour nous ; nous voulons partager avec d’autres la joie que nous avons d’ être données au Christ. Trouver les mots pour dire ce qui nous fait vivre est vital : occasion de revivifier l’appel reçu pour celui qui s’exprime, occasion peut-être d’entendre l’appel du Seigneur pour celui qui écoute…

C’est le service de l’appel. Il sera le rayonnement d’une vie donnée, au clair avec ses propres convictions, capable de rendre compte humblement et passionnément de l’espérance qui l’anime, du souffle de l’Esprit qui la porte, capable, comme Marie dans le Magnificat, de chanter l’action de grâce de Celui qui a fait pour nous des merveilles.

ORIENTATIONS VI
  • Ensemble, nous aimerons à creuser toujours davantage le spécifique de notre vocation de membre de l’ISFCJ au sein de la Famille Cor Unum,
  • Nous prendrons les moyens nécessaires pour développer notre capacité à dire ce qui nous fait vivre, dans un langage adapté au monde d’aujourd’hui.

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